Une étape dans l’histoire des piscines d’accouchement
Editor’s note: This article first appeared in English in Midwifery Today, Issue 54, Summer 2000.
La note du rédacteur: Originallement publié dans Midwifery Today Issue 54, été 2000.
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Traduction de: «A Landmark in the History of Birthing Pools». Traduit de l’anglais par l’auteur.
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Nous retiendrons la date du 21 août 1999 comme une étape dans l’histoire des piscines d’accouchement. Ce jour-là le British Medical Journal (BMJ) a publié une étude sans précédents sur la mortalité et la morbidité périnatales parmi les bébés nés dans l’eau.
Cette étude fait autorité pour plusieurs raisons:
- Les conclusions reposent sur de grands nombres, les auteurs ayant retrouvé les 4032 bébés nés dans l’eau en Angleterre et au Pays de Galles entre avril 1994 et mars 1996.
- Les auteurs appartiennent à une équipe réputée d’épidémiologistes londoniens (Institute of Child Health).
- L’étude a été publiée dans un journal médical qui fait autorité.
Méthodes
L’enquête a combiné plusieurs méthodes afin d’éliminer les risques d’omission.
Entre avril 1994 et mars 1996 tous les pédiatres des îles britanniques ont été interrogés chaque mois. Il leur a été demandé de rapporter les morts périnatales et les transferts en pédiatrie survenus dans les 48 heures consécutives à un travail ou à une naissance dans l’eau. Ces données ont été confrontées aux données d’un organisme auquel toutes les morts perinatales doivent obligatoirement être déclarées. En même temps un questionnaire a été envoyé par la poste à toutes les maternités du service national de santé (NHS) afin de déterminer le nombre de naissances dans l’eau pendant la période considérée.
Résultats
Il y eut 5 morts périnatales parmi les 4032 bébés nés dans l’eau, c’est-à-dire un taux de 1.2 pour mille. Ce taux correspond à ce qu’on est en droit d’attendre pour des naissances à bas risques dans le contexte britannique. De plus aucune de ces cinq morts ne pouvait être attribuée à la naissance dans l’eau: une mort intra-partum a été décelée avant l’entrée dans la piscine; une autre mort survint à la maison, sans assistance, à la suite d’une grossesse clandestine; un bébé mourut d’herpès néonatal; un autre mourut 30 minutes après la naissance d’hémorragie intra-cranienne consécutive à un accouchement ultra-rapide; un autre avait une atrésie des poumons confirmée par autopsie.
Il y eut 34 admissions en unités de soins intensifs, ce qui représente 8.4 pour mille. C’est un taux bas, même pour une population à bas risques. Il y eut, semble-t-il, deux cas d’aspiration d’eau.
Commentaires
Cette enquête concernant plus de 4000 bébés nés dans l’eau est relativement peu connue dans les milieux médiatiques, dans les milieux médicaux et aussi dans les milieux ‘naissance naturelle’. Elle est paradoxalement moins connue que certaines anecdotes isolées rapportées dans la littérature médicale. Il n’en reste pas moins qu’elle représente une étape dans l’histoire des piscines d’accouchement. Aujourd’hui les sages-femmes ne devraient plus être les prisonnières de protocoles stricts. Des lignes de conduite non-dirigistes doivent accepter—comme je l’ai écrit dans Lancet dès 1983—que dans toute hôpital disposant d’une piscine d’accouchement il faut s’attendre à ce qu’un bébé naisse dans l’eau de temps à autre. Les sages-femmes sont moins anxieuses et moins invasives si l’éventualité d’une naissance dans l’eau est acceptée, particulièrement dans le cas où la mère n’est pas disposée à sortir de la piscine lors des irrésistibles contractions d’un véritable «réflexe d’éjection du fœtus.»
Cette étude est une occasion de rappeler que la première raison d’être des piscines est de faciliter l’accouchement et de réduire les besoins en médicaments et interventions. Si l’on veut contenir l’épidémie actuelle de péridurales l’heure est venue de divulguer un petit nombre de recommandations très simples, de façons à utiliser les piscines d’accouchement d’une façon aussi efficace que possible.
Recommandations
Les principales recommandations reposent sur le fait que l’immersion dans l’eau à la température du corps tend à faciliter le processus d’accouchement pendant une durée limitée qui est de l’ordre de une à deux heures. Ce simple fait est confirmé par l’observation clinique et par les résultats d’une étude randomisée contrôlée suédoise suggérant que les femmes qui entrent dans le bain à 5 cm ou plus ont une durée de travail raccourcie et des besoins réduits en perfusions d’ocytocine synthétique et en péridurales.. Les physiologistes peuvent offrir une interprétation. La réponse standard à toute immersion est une redistribution du volume sanguin (plus de sang dans la poitrine) qui stimule la sécrétion par des cellules cardiaques spécialisées d’un peptide (ANP) inhibiteur de l’activité de l’hypophyse postérieure. Il s’agit là d’une réponse à long terme qui peut prendre environ deux heures. Auparavant le bain avait eu pour effet immédiat de soulager la douleur, donc d’abaisser les taux d’hormones de stress, et donc de stimuler les sécrétions d’ocytocine. Ajoutons que c’est en partie via la sécrétion d’ocytocine que les cellules cardiaques spécialisées sont stimulées lors des augmentations du volume sanguin. Il s’agit d’un effet feedback.
La première recommandation pratique est de donner une grande importance au moment où la femme en travail entre dans l’eau. Les sages-femmes expérimentées ont plus d’un truc dans leur répertoire pour aider les femmes à être patientes et à attendre si possible jusqu’à 5cm. Une douche, qui permet habituellement à la femme en travail d’être à l’abri des regards, est un exemple de ce que les sages-femmes peuvent suggérer en attendant.
La deuxième recommandation pratique est d’éviter de planifier une naissance dans l’eau. Quand une naissance dans l’eau a été planifiée, la mère peut devenir la prisonnière de son projet et rester dans la piscine alors même que les contractions sont déjà moins efficaces, au risque de rendre plus longues et difficiles les deuxième et troisième phases de l’accouchement. Il n’y a pas de tels risques lorsqu’une naissance dans l’eau survient à l’occasion d’une courte série d’irrésistibles contractions.
Ajoutons des recommandations concernant la température. Il convient de vérifier que la température de l’eau ne dépasse pas 37°. Des accidents ont été rapportés après immersion dans des bains assez chauds pour entraîner une élévation de la température maternelle, et plus encore de la température fœtale. Une température élevée va de pair avec une augmentation des besoins en oxygène. En d’autres termes un bain trop chaud augmente les risques de souffrance fœtale. Le fœtus a un problème d’élimination de la chaleur.
A l’aube d’une phase nouvelle de l’histoire de la naissance il est permis d’espérer que les piscines d’accouchement entreront sérieusement en compétition avec les péridurales le jour où un petit nombre de recommandations très simples seront divulguées et prises en considération. Aider les femmes à être patientes et à ne pas entrer trop tôt dans la piscine deviendra alors un aspect nouveau de l’art de la sage-femme.
Michel Odent est habituellement présenté comme l’obstétricien qui a introduit les concepts de piscines d’accouchement et de salles de naissance «comme à la maison», lorsqu’il était responsable du service de chirurgie et de la maternité de l’hôpital public de Pithiviers. Après sa carrière hospitalière il a assisté à des naissances à la maison et créé à Londres le «Primal Health Research Centre», dont l’objectif est d’étudier les conséquences à long terme des expériences précoces. Voir la banque de données: www.birthworks.org/primalhealth.
Auteur d’environ 50 articles dans la littérature médicale. Auteur de 11 livres publiés en 21 langues. Ses derniers livres en français sont L’Amour Scientifié, Le fermier et l’accoucheur et Les césariennes: questions, effets, enjeux.